Une agence gouvernementale allemande appelle à une priorité au logiciel libre

Dans un rapport de juin 2024, le ZenDis (Zentrum Digitale Souveränität - Centre pour la Souveraineté Numérique), une agence gouvernementale allemande, dont la mission est de « servir d’organe central et de coordination pour la promotion des logiciels libres (OSS) dans l’administration publique », appelle à utiliser la réforme en cours du droit des marchés publics allemand pour établir une priorité au logiciel libre.

Une information notamment partagée par Stéfane Fermigier (coprésident du CNLL1) dans un billet publié sur LinuxFR2, dans lequel il propose des traductions françaises de certaines propositions du rapport de l'agence allemande. En particulier des propositions de réforme du code des marchés publics allemand visant à favoriser l’adoption du logiciel libre.

Le document intègre ainsi la nécessité de garantir l'interopérabilité par l'usage de normes ouvertes. Il recommande également le recours privilégié aux logiciels libres par rapport à ceux dont les sources ne sont pas accessibles et dont la licence prive l'administration des libertés d'usage, de modification et de redistribution, en intégrant utilement la notion de durabilité « tout au long du cycle de vie ».
Autre point intéressant qui pourrait inspirer de futures réformes françaises : s'appuyer sur les cahiers des charges en rendant obligatoire la mention d'exigences liées à la « souveraineté numérique ».
Nous vous invitons à lire plus en détail l'analyse proposée par Stéfane Fermigier.

Ce rapport nous rappelle, en France, celui du député Philippe Latombe, en 2021, sur le sujet de la souveraineté numérique, où il appelait à la systématisation du recours aux logiciels libres, le recours aux logiciels privateurs de liberté devant être « une exception dûment justifiée ». Dans notre analyse de ce rapport3, qui fait écho aux préconisations de l'agence allemande, nous pointions la nécessité d'une juste mise en balance des besoins des administrations ; que les quatre libertés des logiciels libres doivent être considérées comme répondant à l'impératif d'intérêt général qu'est la « souveraineté numérique ». Nous soulignions également la nécessité de se saisir du levier de la commande publique par un meilleur allotissement des marchés et par une réforme de l'UGAP (Union des groupements d’achats publics) dont les pratiques semblent privilégier les grosses structures et les solutions « prêtes à l'emploi », au détriment, notamment, des entreprises proposant de la prestation sur des logiciels libres.

Quelle que soit la structuration des rapports de force au sein de l'Assemblée nouvellement élue, et la formation du futur gouvernement, il est grand temps qu'une véritable politique publique du logiciel libre soit mise en place ; une politique pensée dans le temps long, avec un pilotage transversal et cohérent, et pas seulement au gré des opportunités, usage par usage, ministère par ministère, comme cela semble malheureusement le cas actuellement.

Cela doit notamment passer l'adoption d'un principe normatif d'une priorité aux logiciels libres et aux formats ouverts dans le secteur public, national comme local, tout en posant les bases réglementaires de sa mise en œuvre, par exemple par renvoi à décret en Conseil d'État, par exemple par une révision des cahiers des clauses administratives générales. Cela pourrait également passer par le renforcement de la mission logiciels libres – en termes de ressources, de compétences comme d'appui politique au-delà de la direction interministérielle du numérique dont elle dépend – qui deviendrait un véritable pôle stratégique, faisant le lien entre les administrations et les différentes communautés du logiciel libre.